Décès de Claudia Cardinale : une légende du cinéma s’éteint à 87 ans

L’actrice franco-italienne, muse de Visconti et Fellini, est morte mardi à Nemours entourée de ses proches. Figure emblématique du septième art, elle laisse derrière elle une filmographie exceptionnelle de plus de 150 films.
Claudia Cardinale n’est plus. L’actrice franco-italienne, icône absolue du cinéma des années 1960, s’est éteinte mardi 23 septembre à l’âge de 87 ans dans sa résidence de Nemours, en Seine-et-Marne, « auprès de ses enfants », a annoncé son agent Laurent Savry à l’Agence France-Presse. Les causes du décès n’ont pas été précisées.
Une carrière née du hasard
Claude Joséphine Rose Cardinale voit le jour le 15 avril 1938 à La Goulette, près de Tunis, dans une famille d’origine sicilienne. Fille d’un ingénieur des chemins de fer et d’une mère française, elle grandit dans un environnement multiculturel, parlant français, arabe et sicilien, mais ne maîtrisant pas encore l’italien.
Le destin de celle qui deviendra « CC » bascule à 17 ans lorsqu’elle remporte, sans même s’être inscrite, le concours de « la plus belle Italienne de Tunis ». Le prix : un voyage à la Mostra de Venise qui va révéler au monde du cinéma cette beauté sauvage aux yeux de braise.
« Je ne voulais pas faire de cinéma. C’est ma sœur qui voulait. Mais ils ont tellement insisté que mon père a lâché », confiait-elle des années plus tard sur France Inter. Son rêve initial était pourtant de devenir institutrice dans le Sahara.
La muse des maîtres italiens
Sous la protection du producteur Franco Cristaldi, qu’elle épousera en 1966, Claudia Cardinale fait ses véritables débuts au cinéma en 1958 dans « Le Pigeon » de Mario Monicelli. Le succès est immédiat avec près de 6,5 millions d’entrées.
Mais c’est Luchino Visconti qui révèle véritablement son talent. À 22 ans seulement, elle tourne « Rocco et ses frères » (1960) aux côtés d’Alain Delon. Le maître italien lui fait peindre les yeux en noir et lui enseigne son métier avec la rigueur théâtrale qui le caractérise.
En 1963, elle atteint les sommets avec « Le Guépard », Palme d’Or à Cannes, où elle crève l’écran entre Burt Lancaster et Alain Delon dans une valse inoubliable. Parallèlement, Federico Fellini la dirige dans « Huit et demi », autre chef-d’œuvre du cinéma italien.
« Visconti, précis, méticuleux comme au théâtre, me parlait en français et me voulait brune aux cheveux longs. Fellini, bordélique et dépourvu de scénario, me parlait en italien et me voulait plutôt blonde aux cheveux courts. Ce sont les deux films les plus importants de ma vie », se souvenait-elle dans Le Monde.
Entre Hollywood et engagement
Réclamée par Hollywood, Claudia Cardinale refuse de s’y installer définitivement mais y tourne plusieurs succès, notamment « La Panthère rose » de Blake Edwards (1963) et « Les Professionnels » avec Burt Lancaster. En 1968, Sergio Leone en fait l’héroïne d' »Il était une fois dans l’Ouest », seule femme face à Charles Bronson et Henry Fonda.
Comparée à Brigitte Bardot, « CC » la brune face à « BB » la blonde, elle incarne un nouveau type de sex-symbol : à la fois solaire et farouche, sensuelle et pudique. Les deux icônes tourneront ensemble en 1971 dans « Les Pétroleuses ».
Femme libre et engagée, Claudia Cardinale n’a jamais hésité à défendre ses convictions. Ambassadrice de bonne volonté de l’UNESCO pour la défense des droits des femmes depuis 2000, elle recommandait aux jeunes actrices de ne pas « tout accepter pour un rôle qui peut vous abîmer ».
Une vie marquée par l’amour et la douleur
Sa vie privée fut marquée par un drame : violée à 18 ans, elle donne naissance à un fils, Patrick, dont l’existence sera longtemps cachée pour protéger sa carrière naissante. Ce n’est qu’en 1975 qu’elle révélera publiquement ce secret, refusant de vivre plus longtemps dans le mensonge.
Sa grande histoire d’amour fut celle vécue avec le réalisateur napolitain Pasquale Squitieri, rencontré en 1974. « Mon seul amour », disait-elle de cet homme avec qui elle vivra 42 ans jusqu’à sa mort en 2017. Ensemble, ils auront une fille, Claudia, et tourneront dix films.
Un héritage exceptionnel
Au cours de sa carrière, Claudia Cardinale aura tourné dans environ 150 films, travaillant avec les plus grands : Marcello Mastroianni, Jean-Paul Belmondo, Omar Sharif, ou encore Werner Herzog. Ses performances lui valent de nombreuses récompenses, dont un Lion d’Or d’honneur à Venise en 1993 et un Ours d’Or à Berlin en 2002.
En 2017, le Festival de Cannes choisit une photo de sa jeunesse pour son affiche officielle, rendant hommage à « une comédienne aventurière, femme indépendante, citoyenne engagée ».
« Elle nous laisse l’héritage d’une femme libre et inspirée tant dans son parcours de femme que d’artiste », a déclaré son agent Laurent Savry. La date et le lieu des obsèques n’ont pas encore été fixés.
Avec la disparition de Claudia Cardinale, c’est une page dorée du cinéma italien qui se tourne. Comme l’avait si justement dit l’acteur David Niven : « Après les spaghetti, c’est la meilleure invention de l’Italie. »
La rédaction présente ses condoléances à la famille et aux proches de Claudia Cardinale.